La France, troisième pays des millionnaires : un podium qui interroge

Un classement flatteur qui cache des enjeux profonds pour l’économie et la société françaises

Le triomphe paradoxal d’une nation riche

Avec 2,9 millions de millionnaires, la France occupe désormais la troisième place mondiale derrière les États-Unis et la Chine. Ce classement étonne dans un pays souvent perçu comme fiscalement hostile aux capitaux. Cette progression, forte de 20 000 nouveaux millionnaires en un an, s’inscrit dans une dynamique globale d’enrichissement privé, portée par la valorisation des actifs immobiliers et la force de l’euro face au dollar. Nombreux sont les Français qui franchissent symboliquement le seuil du million grâce à cette inflation patrimoniale plus qu’à une hausse réelle de revenus.

Ce podium mondial révèle cependant une vérité essentielle : la France sait créer et conserver la richesse privée, un signal fort pour les investisseurs internationaux et les professionnels du patrimoine.

Fiscalité : un équilibre difficile à trouver

Depuis la réforme de 2018, la suppression de l’ISF au profit de l’IFI (centré sur l’immobilier) et l’instauration de la flat tax à 30 % sur les revenus du capital ont visé à renforcer l’attractivité fiscale de la France. Le retour de nombreux foyers fortunés témoigne du succès partiel de cette stratégie. Pourtant, le bilan économique reste mitigé : le comité d’évaluation de France Stratégie souligne qu’aucune preuve tangible ne confirme que ces mesures ont stimulé l’investissement productif.

Pire, cette politique fiscale a surtout conduit à une explosion des dividendes versés aux actionnaires les plus aisés, creusant les inégalités. Ce constat nourrit les débats actuels sur la nécessité d’une fiscalité plus équitable. La France s’engage sur la scène internationale pour une taxation coordonnée des milliardaires, tandis que les discussions nationales sur un éventuel impôt sur les très grandes fortunes restent vives, illustrant la complexité de concilier attractivité et justice fiscale.

Richesse record et fractures sociales

Le paradoxe français est criant : tandis que le nombre de millionnaires explose, plus de 9 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté. La concentration du patrimoine s’intensifie : les 10 % les plus riches détiennent désormais près de la moitié de la richesse totale.

Cette polarisation menace la cohésion sociale et le modèle économique national. Une prospérité déséquilibrée nourrit la défiance, les tensions fiscales et les risques sociaux, mais une croissance plus inclusive pourrait libérer un puissant levier économique : plus de ménages disposés à investir, consommer et entreprendre.

La France doit transformer ce podium mondial en un tremplin pour bâtir une prospérité partagée, conciliant richesse privée et intérêt général.