L’acquisition de Milleis par Crédit Agricole : quand la concentration bancaire s’accélère au détriment de la diversité

L’annonce du rachat de la banque privée Milleis par le groupe Crédit Agricole marque un tournant révélateur de l’évolution du paysage bancaire français. Cette opération, menée conjointement par LCL et Crédit Agricole Assurances, illustre parfaitement la logique de concentration qui gouverne désormais le secteur financier hexagonal. Milleis, héritière de Barclays France et gérée depuis 2017 par le fonds britannique AnaCap, représentait l’un des derniers bastions de l’indépendance dans la banque privée française. Avec ses 12,6 milliards d’euros sous gestion et ses 64 000 clients, elle incarnait une alternative crédible aux mastodontes bancaires traditionnels.

L’annonce du rachat de la banque privée Milleis par le groupe Crédit Agricole marque un tournant révélateur de l’évolution du paysage bancaire français. Cette acquisition, menée conjointement par LCL et Crédit Agricole Assurances, illustre parfaitement la logique de concentration bancaire qui gouverne désormais le secteur financier hexagonal.

Un acteur indépendant de moins

Milleis, héritière de Barclays France et gérée depuis 2017 par le fonds britannique AnaCap, représentait l’un des derniers bastions de l’indépendance dans la banque privée française. Avec ses 12,6 milliards d’euros sous gestion et ses 64 000 clients, elle incarnait une alternative crédible aux mastodontes bancaires traditionnels. Son rachat par Crédit Agricole sonne comme un glas pour la pluralité des acteurs dans ce segment stratégique.

Cette acquisition s’inscrit dans une tendance lourde : la disparition progressive des banques indépendantes au profit des grands groupes mutualistes et commerciaux. Chaque rachat réduit mécaniquement les choix offerts aux clients et homogénéise l’offre bancaire française.

L’ironie de cette opération réside dans son timing. Milleis venait tout juste de retrouver la rentabilité en 2023, affichant pour la première fois depuis sa reprise un résultat net positif de 3,8 millions d’euros. Ce redressement, fruit d’un long travail de restructuration et de la réduction drastique de ses effectifs (de 1 100 à 700 collaborateurs), profite finalement à son acquéreur plutôt qu’à son indépendance.

Une logique de synergies qui interroge

Crédit Agricole justifie cette acquisition par la recherche de synergies et le renforcement de ses positions sur le marché patrimonial. LCL consolidera sa présence auprès de la clientèle fortunée, tandis que Crédit Agricole Assurances renforcera sa filiale Spirica sur le segment haut de gamme.

Cette logique industrielle, si elle est compréhensible d’un point de vue économique, soulève néanmoins des questions sur la diversité de l’offre bancaire. Quand les mêmes groupes absorbent systématiquement les acteurs indépendants qui retrouvent leur équilibre, le risque d’uniformisation des pratiques et des tarifs s’accroît.

Le secteur bancaire français souffre déjà d’une concentration importante, avec quelques grands groupes qui se partagent l’essentiel du marché. L’absorption de Milleis par Crédit Agricole, même si elle reste modeste en valeur absolue, participe de cette dynamique concentrationnaire.

Pour une banque plus diverse

Les autorités de régulation devront examiner attentivement cette opération, prévue pour le premier semestre 2026. Au-delà des aspects prudentiels, c’est bien l’enjeu concurrentiel qui doit être au cœur de leur analyse.

Face à cette tendance, il devient urgent de réfléchir aux moyens de préserver et d’encourager la diversité des acteurs bancaires. Les banques indépendantes, les néobanques et les acteurs spécialisés apportent innovation, concurrence et diversité de l’offre. Leur disparition progressive appauvrit l’écosystème financier français.

L’acquisition de Milleis par Crédit Agricole n’est pas qu’une simple opération financière : c’est le symbole d’un modèle bancaire français qui privilégie la taille à la diversité, les synergies à l’innovation. Une évolution qui mérite d’être questionnée, tant pour les professionnels du secteur que pour les clients qui voient leurs choix se réduire inexorablement.