70 % des Français manquent d’éducation financière : un frein invisible à la construction de patrimoine

Mal connue, peu enseignée et rarement valorisée, l’éducation financière reste l’un des angles morts de la stratégie patrimoniale des Français.

Un déficit reconnu à tous les niveaux

En juin 2025, une étude menée par Elabe pour l’Association Française de la Gestion financière (AFG) révèle un constat sans appel : 70 % des Français estiment avoir une faible éducation financière. Le déficit touche particulièrement les plus jeunes, les femmes et les personnes ayant un faible niveau de formation initiale.

Cette méconnaissance financière se traduit concrètement par l’évitement des placements jugés complexes et la réticence à investir en bourse, même via des produits simples comme les ETF ou les assurances-vie. Près de la moitié des personnes interrogées ne comprennent pas les mécanismes de base des produits d’épargne courants (livrets, PEA, fonds euros).

Plus préoccupant encore : cette faible littératie financière n’épargne pas les actifs supérieurs à la moyenne. 30 % des CSP+ interrogées avouent ne pas se sentir capables d’expliquer clairement le fonctionnement d’un produit d’épargne qu’elles détiennent pourtant. Un paradoxe qui illustre l’ampleur du problème : détenir sans comprendre.

Un coût patrimonial de 40 000 euros sur vingt ans

Ce manque d’éducation financière représente un coût économique massif. Une simulation menée en 2024 par OptiFinance pour Patrimoine Info estime que les pertes de rendement liées à des choix financiers sous-optimaux s’élèvent en moyenne à 2 390 euros par an et par foyer – soit plus de 40 000 euros en 20 ans.

Cette estimation repose sur les écarts entre les placements réellement choisis (comptes courants, livrets non réglementés) et ceux accessibles avec une meilleure compréhension des risques et des horizons d’investissement (fonds diversifiés, SCPI, produits structurés simples).

Le coût ne se limite pas aux opportunités manquées. L’exposition accrue aux arnaques financières vise en priorité les publics peu informés. En 2024, 15 % des Français ont déclaré avoir été victimes d’une escroquerie financière, selon les données de l’ACPR-AMF. Sans connaissance, pas de discernement.

L’urgence d’une priorité collective

Le rapport du Pôle commun ACPR-AMF, publié en mai 2025, insiste sur la nécessité de renforcer les actions pédagogiques à destination du grand public. L’éducation financière doit devenir une priorité politique et culturelle, à l’image de ce qui se fait au Canada ou en Australie, avec un enseignement dès le collège couvrant l’épargne, le crédit, la retraite et la fiscalité.

Le monde du conseil patrimonial doit également évoluer. Les conseillers en gestion de patrimoine (CGP) ont l’opportunité de sortir d’une posture uniquement transactionnelle pour devenir de véritables pédagogues du patrimoine. Dans un contexte où la construction patrimoniale devient de plus en plus complexe, l’accompagnement éducatif représente un enjeu de souveraineté financière individuelle qu’il est temps de reconnaître comme tel.